Jour de pluie
Tout le village est en congé aujourd’hui, c’est l’Ascension… Commémoration d’un épisode anecdotique de la légende d’un lointain parent de ceux qui se disent chrétiens, dont la mort est censée avoir racheté les péchés de tous les autres… Etrange affaire pour le peuple N’Djuka, dont les prémisses de l’histoire remontent au 17ème siècle, avec l’évasion des premiers esclaves africains hors des plantations du Suriname. Mais laissons les considérations historiques pour plus tard ; aujourd’hui il pleut. A peine le coq avait il transpercé l’aube naissante de son premier cri que le ciel se déchirait, nimbant la forêt d’un linceul liquide. Il est 7h du matin, je me glisse dehors et plonge à grandes enjambées vers le dispensaire afin de m’enquérir de l’état de santé de mes premiers patients. Ils sont matinaux, les bougres, et attendent patiemment d’être examinés, bien qu’ils sachent parfaitement que le dispensaire est fermé les week-ends comme les jours fériés. Mais ils s’en moquent, et moi aussi, car aujourd’hui, il n’y a rien à faire, il pleut, et on ne peut rien y faire… Voilà, le dernier est enfin sorti, il nous a été enlevé par la voie des airs pour être emmené en hélicoptère dans une structure hospitalière mieux adaptée à son cas. Une grosse pneumonie, dans la brousse, ça ne pardonne pas… On prend le temps de respirer, décompresser une minute Maryse et moi, partager une bouffée de cigarette au calme avant ressortir affronter la pluie qui ne s’arrêtera pas… Je la regarde encore tomber à travers la fenêtre alors que la nuit est là qui s’installe, et que je n’ai pas vu le jour filer entre mes doigts…